La carte de l’insécurité

Depuis dimanche dernier, nous entrons réellement dans l’Europe. Pas celle du mélange des cultures ni même celle de la monnaie unique, mais celle du fascisme. Après l’Autriche et l’Italie c’est au tour de la France de subir la bêtise ambiante. Au moins, le résultat du premier tour a le mérite d’éclaircir la situation : le Front National est bien vivant malgré la pensée unique actuelle qui semblait l’ignorer. Nous, militants de gauche et d’extrême gauche, n’avons pas arrêté, durant ces dernières années, de lutter contre l’idéologie xénophobe véhiculée par tous les parties d’extrême droite et de droite alors que personne ne nous croyait. Tout le monde semblait sceptique quant à l’éventualité d’un retour en force ("c’est ridicule ce que vous faites, le FN, c’est fini.") Seulement le résultat est là, et il apparaît difficile de revenir en arrière. Essayons simplement de définir les causes de ces 18%. Pour séduire la ménagère de moins de 50 ans et le jeune chômeur en fin de droits, les politiques de la droite mafieuse (Chirac, entre autres) et de la gauche léthargique (Jospin, entre autres) n’ont eu d’autre choix que celui d’adapter à leurs perspectives premières le discours sécuritaire, déjà servi à toutes les sauces depuis longtemps par l’extrême droite, le tout appuyé par TF1, le plus important fournisseur de frissons dans le dos des mamies. Le but, concernant TF1, était évidement de faire campagne pour Chirac, et le résultat a été au delà de leurs espérances car, sans s’en rendre compte, ils ont aussi fait campagne pour Le Pen.

A QUI LA FAUTE ?

En ce moment, on aime parler de déception due à la gauche, mais c’est oublier que la politique de Jospin n’a jamais fait l’objet d’une politique de gauche. On renvoie aussi volontier la faute de ce résultat désastreux aux abstensionistes, mais c’est faire preuve d’une mauvaise fois considérable étant donné que le problème ne vient pas de ceux qui ne votent pas, mais bien de ceux qui votent Le Pen.

France, 1933

Maintenant, on essaie de trouver des solutions. Que faire ? Voter Chirac ou assassiner Le Pen ? Pour ce qui est de la première, rappelons-nous du fameux discours sur le "bruit et l’odeur". Voter Chirac, c’est repousser l’échéance. C’est dire : "Le Pen ne passera pas cette fois-ci, mais certainement dans 5 ans, peut-être sous une autre forme", car quoi de plus faux-cul que de placer Chirac en rempart contre l’extrême droite alors qu’il contribue à sa montée. La recette est simple : mettez dans la tête des gens le sentiment d’insécurité, ils finiront bien par vivre l’insécurité. On essaie de nous faire croire que nous connaissons une époque où la violence est en augmentation. Les gens qui en sont persuadés devraient retourner à une société moyen-âgeuse, peut être alors se sentiraient-ils en sécurité. Cependant, il est évident qu’il existe dans certains quartiers des problèmes que l’on ne peut pas nier. Seulement, réfléchissons aux causes des effets, car :
  premièrement, on ne peut pas décemment demander à des masses que l’on ghettohise de rester tranquilles
  deuxièmement, les plus forts taux de vote FN se trouvent dans les cambrousses dont les habitants pécores risquent plus de rencontrer une vache folle qu’un délinquant.

C’est tout ou rien

Dès l’annonce des résultats, les réactions ont commencé : à Dijon, nous étions 2000 dimanche soir dans les rues et presque 6000 lundi soir ( 60 selon les forces de l’ordre ). Les gens se sentent d’un seul coup concernés parce que la menace est proche. Précisons simplement qu’avant ce jour, les manifs anti-FN ne dépassaient pas 100 personnes. Il est tout de même dommage qu’il faille en arriver là pour que les gens bougent leur cul. De plus, le fascisme est inhérent au capitalisme. Durant toute l’histoire, les systèmes capitalistes ont immanquablement engendré le fascisme en créant des inégalités, donc de la haine entre les peuples. Seulement, tous les participants des manifs anti-FN n’ont pas l’air de condamner le capitalisme par là même. Ils voudraient pouvoir continuer à vivre le système économique actuel sans pour autant déboucher sur les politiques xénophobes. Il faudra bien comprendre un jour que la meilleur façon d’éradiquer le fascisme est d’abolir la société capitaliste libérale.

Ils ne passeront pas, ni Le Pen, ni Messier

Sur ce point, nous appelons donc les 6000 participants de la manif de lundi à participer à une grande manif anticapitaliste lorsque le deuxième tour sera passé.

Brèves

Deuxième tour
Vous préférez "le bruit et l’odeur" ou la version originale ?

Vite dit
Marine Le Pen (la fille du porc) violée par un arabe. Alors, Jean-Marie, toujours contre l’avortement ?

Les républicains d’abord
Chirac affirme qu’il a toujours refusé de faire alliance avec l’extrême droite. Forcément, il pratique déjà leur politique depuis 7 ans.

Poésie

D’où peuvent bien provenir ces sons ambitieux
Combien de voix pour porter des mots creux
Mais dites-moi d’où nous vient ce vacarme
N’est-ce pas la conscience collective qui crie Aux armes ?

TéhèR